dimanche 24 novembre 2013

LE FANTOME DU METROPOLE

Un spectre hante la rue Neuve, parmi la foule des piétons brûlants de fièvre acheteuse, entre Celio, Zara, Hema, Inno et Mango : le Métropole, le plus grand cinéma de Bruxelles.

Nous sommes en 1932. Bien connue des amateurs de bières, la famille Wielemans a demandé à l'architecte Adrien Blomme, déjà auteur de la brasserie de Forest (le futur Wiels), de réaliser une salle de 3000 places. Façade en marbre de travertin, verrières en courbes et contre courbes, double balcon, bas-relief de Zadkine au dessus de l'écran, décoration luxueuse de Raymond Nicolas, rien n'est trop beau pour le Métropole, dont l'appartement du directeur, au dernier étage, comprend quinze pièces et un ascenseur privé. L'inauguration a lieu le 27 octobre, starring la Reine Elisabeth et la Princesse Astrid.

Scénario bien connu, quarante ans après, en 1971 la salle est mutilée pour être transformée en multiplexe. C'est le générique de fin pour le Métropole, qui tire le rideau en avril 1994, cédant la place aux magasins P&C, Zara, puis H&M. La façade, miraculeusement conservée, a été récemment enveloppée d'un filet jaune inquiétant.

Le vulgus brusselus pecum qui achète ses slips chez Hennes & Mauritz sait-il que Marlene Dietrich a murmuré ich liebe dich là où s'alignent désormais des linéaires de culottes made in China ? Qu'à la place de gondoles de chaussettes, des dizaines de milliers de spectateurs ont combattu le Capitaine Bligh au côté de Clark Gable himself ? Et qu'Ossip Zadkine, dont le bas-relief doré est toujours caché quelque part dans les murs de l'ex-ciméma, n'est pas une marque de streetwear, mais un sculpteur d'origine russe dont il existe un musée à Paris ?

Rue Neuve 30, 1000 Bruxelles

LIENS :
Cinemake
Mémoire 60-70
Ossip Zadkine


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